Association Française des
Sciences et Technologies de l'Information

Hebdo
No 49. 29 octobre 2001

Sommaire : Trois questions à Michel Dupire, France telecom R&D | L'actualité de la semaine | Théories et concepts | Enseignement | La recherche en pratique | Manifestations | Le livre de la semaine | Détente

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Trois questions à Michel Dupire

Directeur, stratégie R&D, France Telecom R&D

"L'internationalisation est omniprésente dans nos activités comme dans notre stratégie de recherche"

Asti-Hebdo : Comment un grand opérateur de télécommunications, dans une conjoncture relativement difficile, oriente-t-il sa stratégie de recherche ? Etes-vous conduit à porter une attention particulière aux attentes de votre clientèle ?

Michel Dupire : Bien entendu, les technologies de la communication continuent d'occuper une place très importante dans notre activité. Mais on voit trop l'innovation sous un angle exclusivement technologique. Pas de vraie innovation sans la rencontre d'une technologie (télécommunications, mais aussi marketing, juridique) et d'un marché, ou plus généralement d'un besoin. je voudrais donc insister sur la thématique des usages, qui est un axe majeur de recherche et de développement pour les télécommunications et en particulier pour un opérateur comme nous.

Nous devons avoir la meilleure idée possible de ce que seront demain les besoins et les usages, et de la manière dont nous pouvons faire évoluer nos clients dans leur environnement et leurs besoins, qu'il s'agisse de particuliers ou d'entreprises. A plus court terme, il est clair que la facilité d'accès et d'utilisation des services et un facteur clé de leur développement. Il nous faut donc travailler sans relâche à rendre plus facile l'ergonomie des services.

Nous avons donc ces dernières années renforcé significativement nos capacités de recherche et d'études dans les domaines de la sociologie et des sciences humaines. Nous avons aussi notre "studio créatif", qui permet des mises en situation d'utilisateurs sans se préoccuper de la disponibilité des technologies.

Dans notre métier, il faut prendre en compte trois composantes : les technologies, les organisations (entreprises et autres institutions), les hommes. La difficulté majeure, c'est que ces trois composantes ont des cycles d'évolution de durée très différente. Les technologies progressent très vite, les hommes lentement, les organisations suivent des cycles intermédiaires.

Pour citer une expérience personnelle qui illustre cela, à Biarritz (dont j'ai été le chef de projet), nous avions de l'expérimentation de vidéo à la demande. Et je constate que, en matière de VOD (video on demand, cinéma sur commande), ce que nous constations à l'époque (1987) en termes de nombre de films par mois ou de prix acceptable reste vrai aujourd'hui. Inutile de dire que la technologie n'a vraiment plus rien à voir, par contre.

Hebdo : La recherche en télécommunications aurait donc une dimension temporelle marquée, plus par exemple que la réalisation des processeurs ou le déploiement de l'informatique de gestion traditionnelle ?

M.D. : Concrètement, notre raison d'être est de mettre en oeuvre des réseaux pour fournir des services à notre clientèle. Au cours des cinq dernières années, nous nous sommes concentrés sur ce coeur de métier.

Les activités de R&D que nous conservons en propre (à France Telecom R&D ou dans d'autres instances du groupe), se répartissent sur différents horizons de travail .

- De trois à 18 mois, il s'agit de répondre aux besoins et aux demandes de nos unités d'affaires. Le temps de réponse doit être plus rapide pour les services (en particulier les services internet) que pour les réseaux. Il s'agit ici de développement, avec des méthodes et des savoir-faire pour intégrer au mieux les produits du marché, pour développer des solutions innovantes avec éventuellement des couches d'interfonctionnement et d'interaction.

- De 18 mois à trois ans, les affaires ne sont pas encore définies, les technologies sont en train de mûrir. Notre action d'anticipation comporte là deux volets : d'une part la préparation des plates-formes qui permettront ensuite le développement rapide d'applications et de services en cycle court, d'autre part de comprendre par des expérimentations ce que peuvent être les "nouveaux businesses".

- Au delà de trois ans, nous quittons la logique un peu linéaire des besoins et des plates-formes appropriées pour des approches plus transversales et en rupture, où de grands domaines technologiques émergent pour servir nos métiers. Nous dialoguons et nous travaillons avec des partenaires : universités, laboratoires publics de recherche, industrie. Nous sommes en particulier un des acteurs des réseaux nationaux de rechercher (RNTR, RNTL, RIAM en particulier).

Globalement, la R&D consomme 1,3% du chiffre d'affaires du groupe. Sur cette somme, plus de la moitié va au court terme, le reste étant également réparti entre moyen terme et long terme. Nous avons près de 3000 personnes à FTR&D pour l'ensemble des activités de recherche et de développement.

Depuis le milieu des années 1980, le mouvement de libéralisation des télécommunications, s'accompagnant de la mondialisation de l'industrie, a fortement changé le modèle d'affaires. Autrefois spécificateur de nos équipements, nous sommes aujourd'hui bien plus intégrateurs, avec pour préoccupation très forte le niveau de service pour nos clients. L'enjeu, pour nous, est de savoir au mieux utiliser dans nos réseaux les briques (systèmes, commutateurs, routeurs, fibres...) dans nos réseaux, pour offrir à notre clientèle une gamme de services aussi large que possible et au moindre coût.

Nous nous sommes donc dégagés des technologies de base. Nous étions par exemple présents dans la micro-électronique et dans les technologies de base de la tansmission optique. Nous terminons de sortir de fait de ces deux domaines, en ayant particulièrement veillé avec les partenaire industriels ou de la recherche à ce que les compétences acquises soient transférées dans les meilleures conditions pour la recherche et l'industrie nationales. C'est ce que nous avons fait avec STMicroElectronics et le CEA/Leti dans le silicium, et avec le CNRS et Alcatel en optique. Dans ce dernier domaine, deux créations de start-ups performantes ont aussi été menées.

En effet, le travail sur les technologies de base doit être mené par nos fournisseurs, les équipementiers. Car nous n'en sommes pas les utilisateurs directs. Nous nous intéressons tout de même à certains points qui ont un impact direct sur nos coûts. Par exemple, en matière de fibre optique, aux technologies de raccordement.

Il n'est aucun type de composants intéressants pour nous, logiciels aussi bien que matériels, qui ne puisse être développé à l'extérieur, car désormais les opérateurs constituent un marché. Si l'on prend un point aussi spécifique que la facturation des opérateurs, il n'intéresse que nous. Et pourtant, de grands éditeurs comme Portal ont construit l'essentiel de leurs affaires sur ces produits. De même, les études de perturbations de propagation à 900 MHz n'intéressent que les opérateurs de mobiles. On en trouve cependant sur le marché.

Il reste que nous devons connaître l'état de l'art chez nos fournisseurs, entretenir avec eux des relations en amont, pour prévoir l'évolution des technologies et leur faire comprendre nos stratégies et l'évolution de nos besoins. Nos compétences relèvent alors essentiellement des architectures et de l'intégration, pour les réseaux comme pour les services.

Nous avons intérêt à être les leaders dans certains domaines pour avoir un avantage compétitif, c'est à dire un coup d'avance. Mais aussi pour travailler avec les meilleurs du marché, au niveau mondial. Cela permet de partager les risques, mais aussi de bénéficier de compétences qui, aujourd'hui, sont partout dans le monde.

Hebdo : Cette mondialisation se traduit-elle au niveau de la recherche ?

M.D. : L'internationalisation est désormais omniprésente dans nos activités comme dans notre stratégie de recherche.

Nous sommes depuis un peu plus de trois ans en Californie : nous avons ouvert un laboratoire à Brisbane. Il réunira une centaine de chercheurs à la fin de l'année, dont seulement 15% ou 20% de français. Sa mission est tournée vers l'extérieur : veille technologique et intégration dans nos produits des technologies disponibles dans l'environnement californien. Il s'agit de voir comment le marché s'approprie les nouvelles technologies, mais en tenant compte des différences entre le marché européen et le marché américain.

Nous avons installé cette année un laboratoire à Tokyo, avec une dizaine de personnes, pour étudier les services en mobilité et les terminaux associés, où le Japon a fait des avancées fantastiques. Un troisième laboratoire, à Londres, a surtout pour objectif d'accompagner le développement des services dans Orange. Nous prévoyons d'ouvrir un laboratoire à Boston, proche du MIT et du Médialab, donc avec une orientation multimédia et interfaces homme-machine. Enfin, en Pologne, TPSA possède une entité de recherche-développement avec laquelle nous resserrons les liens pour tirer la meilleure efficacité de l'ensemble de nos forces de R&D.

Enfin, nous intervenons activement dans les organes de standardisation. La standardisation reste bien entendu un enjeu majeur pour nos métiers, car c'est une condition indispensable à l'interconnexion et à l'interopérabilité plus aisées des réseaux. Ces institutions et leur mode de fonctionnement ont beaucoup changé depuis 1995. Les organismes traditionnels (UTI, ETSI...) ont vu émerger les forums, avec un mode d'organisation beaucoup plus réactif, dont l'exemple majeur est l'IETF pour Internet. On voit d'ailleurs apparaître un mode de fonctionnement où les forums alimentent les organismes de normalisation institutionnels, qui restent irremplaçables car certains points doivent devenir réglementaires.

L'actualité de la semaine

Budget civil de la recherche publique

Le projet de BCRD est rendu public. Le dossier complet peut être téléchargé (format PDF). Pour le SNCS, ce budget est très proche decelui de 2001, mais insuffisant pour redresser la situation critique de la France.

Gestion de l'emploi scientifique

Le ministre de la Recherche a présenté au conseil des ministres du 24 octobre 2001 le plan décennal de gestion prévisionnelle de l'emploi scientifique. Ce plan poursuit cinq objectifs :
- anticiper dès à présent les départs à la retraite massifs des années 2005-2010 ;
- rajeunir l'appareil de recherche publique ;
- réorienter cet appareil en renforçant les champs disciplinaires prioritaires (sciences de la vie, sciences et technologies de l'information et de la communication, environnement) ;
- renforcer la recherche publique ;
- favoriser la mobilité des personnels de recherche.

Albert Ducrocq a rejoint les étoiles

Journaliste scientifique et chercheur, passionné de Stic autant que de conquête de l'espace, Albert Ducrocq, selon le communiqué a "rejoint les étoiles" le 22 octobre dernier. Il a contribué jusqu'à la fin à l'information du grand public comme des milieux spécialisés et à l'animation de la communauté. En particulier, il avait, cet été, accepté la présidence de l'Institut Frédéric Bull pour lui donner une nouvelle impulsion.

Des sites perso "au top des classements"

Internet Actu signale que les sites personnels parviennent parfois à se hisser "au top des classements", selon eMetrie, spécialiste de la mesure d'audience sur Internet.Selon MG Internet Actu 17/10/2001

Lernout & Hauspie en faillite

Selon Transfert.net, un tribunal de commerce belge a déclaré Lernout & Hauspie en faillite. Ce qui ouvre la voie à une liquidation prochaine des derniers actifs du spécialiste de la reconnaissance vocale. Encore une belle entreprise high-tech qui disparaît !

Coopération, innovation et technologie

Le colloque Cite'2001 (Coopération, Innovation et Technologie), parrainé par l'Asti, se tiendra les 29 et 30 novembre prochains à l' Université de technologie de Troyes.

Au programme, notamment :
- Approches interdisciplinaires de la coopération et de l’innovation
- L'apport de l'interdisciplinarité dans la conduite de projet NTIC (expérimentation dans la filière textile)
- Méthodes et outils pour les systèmes coopératifs
- Un méta-modèle de gestion par les activités
- Une approche pour l’analyse automatique de comportements sociaux d’apprenants lors de conversations synchrones médiatisées
- Systèmes de conception coopérative
- La cartographie des connaissances critiques
- Mémoire de projet, processus dynamique de modélisation des connaissances
- Support de la coopération à distance: modèles et outils
- Cookmap, vers un modèle de coopération de type « place de marché » entre agents cognitifs

Bulletin d'inscription et informations pratiques

Coeur numérique

Le bulletin Inédit de l'Inria est en ligne. Au sommaire, le coeur numérique.

Par ailleurs, Transfert.net signale que deux sociétés américaines s´apprêtent à commercialiser des pacemakers capables de transmettre aux cardiologues, en temps réel et à distance, des données sur le rythme cardiaque de leurs patients.


Enseignement

Documentation gratuite

L'EPI met gratuitement à disposition des enseignants (école-collège-lycée) et formateurs, sa documentation pédagogique :
- analyses de logiciels et de cédéroms ;
- relations d'expérimentations pédagogiques avec Internet ;
- articles de fond et réflexions sur l'utilisation des TIC en classe ;
- éléments d'information et fiches de travaux pratiques pour l'enseignement de l'informatique au lycée ;
- EPI.Net, revue électronique, et ses archives sur plusieurs années avec regroupement par discipline.

Voir rubrique "pédagogie" sur le site de l' EPI.

Recrutement et formation des enseignants

Le ministre de l'Education nationale vient de consacrer un discours à ce sujet. Jacques Baudé (EPI) note que les TIC, l'informatique, l'ordinateur, la technologie, etc. n'y apparaissent qu'en filigrane. Nous sommes en 2001 et il faut encore attendre ... d'autres textes qui viendront s'ajouter à des textes qui existent déjà.


La recherche en pratique

Emetteurs de contenus

Le premier Ministre lance son deuxième appel à propositions eContent. Une réunion d'information réunion d'information se tiendra le 15 novembre.

Adopté en décembre 2000, d’un montant de 100 millions € pour la période 2001-2005, le programme eContent s'adresse aux acteurs de la production, de l'édition et de la commercialisation de contenus multilingues en ligne, ces contenus pouvant être de nature juridique, culturelle, commerciale, financière, technique, d'information générale ou pratique, etc...

Un volet de ce programme est plus spécifiquement consacré à la diffusion et à la valorisation des contenus produits par les Administrations et les collectivités locales. EContent soutient également la réalisation de sites et de portails multilingues, la création d'outils linguistiques et encourage les projets transfrontaliers en matière d'outils de formation linguistique.

Les projets de gestion des droits de propriété intellectuelle ou d'accès au capital-risque des entreprises du secteur sont aussi éligibles. Enfin, le deuxième appel à propositions vise également les applications développées sur l’internet mobile et la télévision interactive. La contribution de la Commission européenne en faveur de chaque projet retenu pourra atteindre 2 millions d’euros.

Pour participer à cette réunion, une inscription préalable est obligatoire auprès de Sophie de Beauregard. Téléphone du secrétariat : 01 42 75 57 88.

Un nouveau directeur à l'Inist

Raymond Duval est nommé directeur de l'unité propre de service n°076 intitulée "Institut de l'information scientifique et technique" Inist, à compter du 5 novembre 2001.Raymond Duval, ingénieur de recherche hors classe, est délégué régional de la circonscription Île-de-France sud du CNRS.

Manifestations

RFIA

Le 13ème congrès francophone Afrif-Afia de Reconnaissance des Formes et Intelligence Artificielle se tiendra du 8 au 10 janvier dans la douceur du début d'année angevin au Centre des congrès d'Angers. Accueil web

Co'2001

Le congrès des opérateurs (de télécommunications) se tiendra du 27 au 29 novembre aux salons de l'Aveyron.

Informatique et société

L'édition 2002 d' Ista (Information symposium on technology and society) se tiendra du 6 au 8 juin à Raleigh (Caroline du Nord).

Le livre de la semaine

Faites référencer votre site

Rien ne sert de faire un beau site s'il n'est pas bien référencé. Jean-Pierre F. Eskenazi s'attache à donner toutes les informations et conseils nécessaires dans son livre "Référencement" qui vient d'être publié par Webedition-Netbooster.

Détente

Chat électronique

C'est Omron, constructeur d´instruments de mesure électroniques, qui s´apprête à commercialiser un chat en peluche électronique.
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