@TITRE:Le FM: pourquoi et jusqu'où

@CHAPO:Le FM? Oui, mais pas à n'importe quelles conditions, ni pour faire n'importe quoi. La position des entreprises à l'égard de cette nouvelle solution est devenue moins radicale. L'expérience américaine aura appris que le FM ne pouvait être un remède miracle. Ayant diversifié ses formes et ses applications, il trouver dans l'évolution technologique de nouvelles occasions de développement.

@TEXTE:Finis les grands discours simplistes, pour ou contre le FM. De multiples expériences permettent aujourd'hui d'en dégager les avantages et les inconvénients. Les formules se sont affinées et diversifiées, elles aussi. Plus qu'un transfert total des responsabilités informatiques à un prestataire, l'infogérance se conçoit aujourd'hui comme la sous-traitance d'un certain nombre de fonctions bien définies. Des consultants spécialisés proposent aujourd'hui leurs compétences appuyées sur des méthodes et des grilles précises (voir figure).

@INTER:Bien définir la portée de l'infogérance

@TEXTE:Le FM peut porter sur une opération aussi spécifique et localisée dans le temps qu'un déménagement. La Société Générale en a donné un bon exemple quand elle a quitté différents établissements parisiens pour poser son logo sur une tour proche de la Grande Arche.

A l'inverse, elle peut s'appliquer à une fonction relativement modeste, mais de longue durée, comme la gestion du parc de micro. Le groupe Elf a été assez loin dans ce sens.

La mise en place du réseau Aeronet ouvre d'autres perspectives, déjà largement explorées par le transport aérien. Il s'agit cette fois d'associer quelques grands partenaires (Boeing en tête, mais aussi Airbus) à un vaste outil d'ampleur internationale, pour se décharger d'une lourde obligation: la fourniture à des clients répartis partout dans le monde d'une documentation textuelle et graphique considérable.

Dans certains cas, le FM informatique s'intègre à une sous-traitance plus large, portant sur des fonctions complètes de l'entreprise, comme la gestion des encaissements. Et bien sûr la distribution, bien que cette forme de délégation remonte aux origines du commerce, bien avant l'apparition du concept de FM.

Dans une optique plus propriétaire, en revanche, nombre de groupes industriels ont donné un statut de "FM interne" à une filiale informatique. Le succès dépend ici d'un bon équilibre des deux clientèles de cette SSII. Si elle s'ouvre trop sur l'extérieur, elle perd sa spécificité et sa disponibilité aux besoins du groupe. Si elle reste frileusement au sein de la maison, le système des facturations internes risque de rester un simple jeu d'écritures.

L'infogérance, comme le recours au progiciel, trouve sa rentabilité quand l'entreprise peut trouver à l'extérieur des services meilleurs et/ou moins chers qu'en son sein. La différence peut porter sur les hommes, des machines ou - last not the least - de la trésorerie.

@INTER:L'importance cachée du facteur humain

@TEXTE:Les critères humains prennent souvent la première place, même si l'on n'en parle qu'avec précaution. Au centre du problème: la personnalité et les performances du DSI et de ses équipes. Tantôt l'entreprise ne se contente pas des performances de ses personnels, mais ne voit pas le moyen de les faire suffisamment évoluer. Questions de motivation, de carrières, d'âge parfois. Le passage au FM, peut débloque la situation. Au prix d'une pression certaine sur le personnel transféré. L'opération doit donc s'assortir d'un plan social approprié.

Tantôt, au contraire, l'équipe informatique ne trouve plus dans son entreprise un cadre à la mesure de son dynamisme et de ses ambitions. Elle pousse à une filialisation qui élargit ses horizons. Et peut aller jusqu'à souhaiter un FM qui ouvrira des perspectives larges, internationales peut-être. Cette évolution peut notamment débloquer des rigidités dues à des conventions collectives mal adaptées aux carrières des informaticiens.

La rigueur des contrats d'infogérance permettent aussi de mettre de l'ordre dans la dépense quand informaticiens, utilisateurs et direction générale ne parviennent pas à se mettre d'accord sur des procédures efficaces de régulation.

@INTER:Rentabiliser les machines

@TEXTE:La force du prestataire de FM, c'est de pouvoir répartir la charge d'un parc de matériels et de logiciels entre plusieurs utilisateurs. Hier, il s'agissait surtout de rentabiliser de grosses machines centrales coûteuses. Aujourd'hui, les gains porteront plutôt sur les logiciels systèmes des mainframes, et les outils réseau. La prestation peut alors s'organiser en services bien intégrés, combinant les matériels de production et les équipes spécialisées qu'ils exigent: personnel d'exploitation, spécialistes réseaux, etc.

Enfin, n'oublions pas la trésorerie de l'entreprise. L'offreur de FM emporte plus facilement la décision si ses fonds propres ou ses capacités de financement extérieur lui permettent de raisonner sur un meilleur taux d'actualisation que son client. Une entreprise en difficulté peut donc être particulièrement tentée par ce type de solution, surtout si l'offre de services s'accompagne explicitement d'un rachat de parc, par exemple.

@INTER:Standards et spécificité du métier

@TEXTE:Enfin, on insiste aujourd'hui sur les facteurs stratégiques de différenciation. L'entreprise doit maintenir, et renforcer, des compétences et des ressources qui lui permettent d'être seule à offrir certaines prestations. Dans cette optique, le recours au FM porte surtout sur les fonctions les plus banales de l'entreprise, là où les standards de la profession valorisent le "moins disant" et permettent de bien contrôler ses prix et ses performances. En revanche, l'entreprise se concentre sur "son métier" et garde là toute sa spécificité, depuis la gestion des réseaux correspondants jusqu'au développement des applicatifs. Difficile à confirmer par l'expérience, cette approche a au moins le mérite de la rationalité, là du moins ou le métier de l'entreprise se laisse définir assez naturellement, ce qui n'est pas toujours le cas.

Le progrès technologique pourrait ouvrir encore d'autres perspectives au FM. L'Intranet, par exemple, transpose à l'intérieur de l'entreprises un certain nombre des caractéristiques qui ont fait le succès d'Internet: asynchronisme, généralisation du mode message, banalisation des ressources réseau. Les frontières de l'entreprise deviennent alors plus virtuelles que matérielles. Les firewalls prennent la place du béton et du verre pour délimiter les territoires. D'où la possibilité de topologies nouvelles pour une offre de sous-traitance libérée des contraintes classiques de la localité et des spécificités architecturales.

@INTER:Il faut être fort pour bien sous-traiter

@TEXTE:L'infogérance, en tous cas, doit se jouer avant tout comme un mouvement positif. Pas comme une bouée de sauvetage pour cas désespérés. En cas de trésorerie catastrophique, ou de désordre généralisé (pour ne pas employer de mot grossier), il faut d'abord assainir la situation. Pour bien contrôler un fournisseur aussi stratégique que le prestataire de FM, l'entreprise cliente doit garder en son sein, au minimum, une équipe hautement compétente sur le plan technique et surtout sur le plan managérial.

@SIGNATURE:PIERRE BERGER